Ah
ce groupe D, je l’attendais, puisque c’est celui dans lequel concoure mon ami
Francis Ash. Il n’empêche, je me suis prêté en toute objectivité à la lecture et
aux commentaires des quatre récits proposés cette semaine. Bien-sûr, ces
commentaires contenant des spoilers, je vous conseille de lire les nouvelles
AVANT ces commentaires.
La danse de Saint-Guy, de
Julien Noël :
Ce
concours a le mérite de permettre à tous les styles et toutes les approches
littéraires de s’exprimer. Néanmoins, rarement (pour ne pas dire jamais), je
n’ai rencontré de style aussi impersonnel et anonyme. J’ai plus l’impression
d’avoir lu la description d’une scène tirée hors de son contexte que d’avoir lu
un récit qui racontait quelque chose avec un début, un milieu et une fin. On
nous parle d’un conflit qu’il nous est impossible à situer dans le temps et
l’espace avec des protagonistes dont on ne sera rien. Au milieu de tout ça une
armurerie, des pendus et un géant. L’armurerie et les pendus trouvent leur
justification dans le texte, mais le personnage du géant reste une énigme
totale. Tout comme la raison de sa danse. L’absence quasi-totale d’action et la
narration purement descriptive rend le texte lourd et donne une impression
d’exercice scolaire du type « décrivez une scène ». Résultat, j’ai
glissé à la surface des mots jusqu’à la fin sans jamais accrocher. Désolé, ce
n’est pas pour moi.
Rafaele, de Claire
Girard:
Voici
un beau récit original et assez touchant. Cette petite fille maltraitée qui
échange avec ses peluches émeut. Quand on est parent (ce qui est mon cas), il
est difficile de ne pas être touché par cette thématique. L’écriture est
attachante. Toutefois, je regrette un gros manque de relecture qui nuit à la
fluidité de l’ensemble (trop de coquilles). Sur le plan purement
« fantastique » (puisque c’est le genre auquel a priori se rattache
cette nouvelle), j’aurais tout de même quelques remarques cependant :
- Les peluches connaissent l’avenir (et même les réalités alternatives),
super idée, mais par quelle magie ? Ce n’est pas très clair.
- Nounours se trompe de perspective (ah les paradoxes temporels !).
Je m’explique : Nounours prétend que Rafaèle aurait dû non pas mettre du
désordre dans sa chambre mais dans celle de sa mère (où elle aurait du y faire
une découverte capitale pour son avenir). En fait, ce discours n’est tout
simplement pas possible. Pour avoir la connaissance de cet avenir-là, Nounours
devrait forcément en venir. Il lui faudrait donc avoir remonté le temps depuis
ce futur « heureux ». De cette manière, il pouvait vivre en direct
l’acte qui a transformé le futur « heureux » en
« malheureux », créant ainsi une réalité alternative décrite dans
cette nouvelle (re-regardez Retour vers le futur - ça tombe bien c’est son 30ème
anniversaire !). Comme rien n’indique cela dans le récit (puisqu’on ne
sait rien sur les capacités cognitives des peluches et que l’on ne nous parle
pas de voyage dans le temps), il faut considérer que le texte décris la réalité
non modifiée, selon laquelle la petite fille n’a pas mis le désordre dans la
chambre de sa mère, mais bien dans la sienne. Le vrai futur est donc
logiquement le futur « malheureux », Nounours et ses copains en
peluches interviennent pour changer la course du temps et créer une nouvelle
réalité alternative, le futur « heureux ». Du coup, dans le récit, il
n’aurait pas dû dire « en faisant ceci cela, tu serais devenue ceci, tu
aurais fais cela », mais plutôt, « grâce à cet acte, tu feras ceci
cela et tu deviendras ceci cela », c’est pas tout à fait la même chose.
Suis-je compréhensible ?
Cela
dit, ce récit m’a beaucoup plu et m’a poussé à la réflexion. Avec une bonne
relecture, il sera excellent.
Précieux, d’Annabelle
Blangier :
Un
bateau qui erre en mer au milieu d’un brouillard épais, un équipage aux abois,
un garçon curieux, des bruits étranges de créatures aquatiques (des
sirènes ?), en ça rien de très original. Toutefois l’auteur sait
doucement faire monter la tension tout
au long de son récit. J’avoue avoir été pris par le récit. Le personnage du capitaine
est bien décris. J’ai apprécié la justification du titre de la nouvelle qui
donne matière à réflexion. De plus, les noms des personnages sentent bon la
Bretagne, ce qui donne un certain charme à l’ensemble. Le style participe très
bien à entretenir le mystère. La conclusion tragique était un peu attendue,
mais est logique. En conclusion, un bon récit.
Mort Chronique, de Francis Ash :
A priori, il n’est pas évident de commenter la
nouvelle d’un ami et comparse d’écriture. Voilà bien une vingtaine d’années que
je côtoie l’écriture de monsieur Ash sous ses différents noms de plume. J’ai
donc déjà eu de nombreuses occasions de commenter ses récits et pas que pour en
dire des louanges, il pourra l’attester. Cette précision faite, commençons.
Dès les premières phrases, j’ai été accroché par
les mots et la thématique. Il flotte un parfum de code quantum dans cette
nouvelle, sauf que l’esprit qui bondit de corps en corps, tue systématiquement
son porteur. Si la mort de Serge m’a laissé froid (peut-être parce que le
personnage paraît, reconnaissons-le, un peu ridicule), celle d’Eléonore était
touchante, mais ce n’est rien comparé à celle de la petite Merline (quel drôle
de prénom d’ailleurs !) qui m’a quand même bien remué, mais bon c’est
l’effet recherché, je suppose.
J’ai aussi été saisi par un sentiment d’urgence.
Comme le personnage principal, on court, on
court, en se demandant quelle en sera la destination et le pourquoi de
cette course. Le style participe beaucoup à cela en insufflant un rythme haletant,
sans pourtant laisser de côté descriptions et moults détails. On comprend très
vite que l’esprit n’a que peu très peu de temps pour atteindre son but.
L’esprit de qui d’abord ? La révélation de
son identité n’a en fait pas beaucoup d’importance, c’est ce qui lui est arrivé
qui compte. Pourquoi suite à son meurtre saute-t-il de corps en corps ? là
ça restera un mystère. J’imagine que trouver une explication aurait été
laborieux voire tiré par les cheveux, du coup, un petit sentiment de frustration
à ce niveau là.
Et puis quel but au fait ? Là aussi petite
frustration. Finalement, il n’aspire qu’à mourir. On aurait pu imaginer qu’il
veuille plutôt se réincarner définitivement dans un corps sans que celui-ci ne
meure aussitôt. Bon du coup, on partait dans autre chose et ce n’était plus
vraiment « mort chronique », je le concède.
Concernant le twist final, franchement, je l’ai
trouvé excellent. Il m’a fait penser aux vieux films d’horreur où l’on pense
que tout est fini alors qu’il n’en est rien. Je n’en dirais pas plus, mais
l’effet est réussi.
Certes, il y a quelques détails qui ont pu
m’interpeller, mais globalement, par ses qualités narratives, ce récit est
d’excellente tenue. Francis Ash peut être assuré de tout mon soutien. Allez,
osons le dire, on a peut-être là un candidat pour le carré final. En tout cas,
au moment où j’écris se profile doucement mais sûrement une qualification pour
la suite. C’est mérité.
Voilà
ce que je pouvais dire sur ces 4 textes. Le groupe D m’a davantage emporté que
le groupe C dont le grand gagnant « des vacances à la ferme » m’a
laissé dans l’incompréhension la plus totale.
A
nouveau, je vous invite à vous faire votre propre avis en LISANT les nouvelles
sélectionnées disponibles au lien suivant :
Et
surtout ensuite d’aller VOTER pour vos nouvelles préférées.
Précision
importante : La semaine prochaine fera exception à la règle. Etant donné
que c’est ma nouvelle qui entre en lice (dans un groupe où dit-on il n’y a pas
de nouvelles faibles, aie !), je ne publierai pas de commentaires avant la
proclamation des résultats pour assurer une parfaite neutralité. Par contre, je
ferai un petit point d’étape sur le tournoi en y allant de mes impressions et
pronostiques.
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