mercredi 7 octobre 2015

Le 6ème tournoi des nouvellistes, commentaires des nouvelles de la semaine 4

Ah ce groupe D, je l’attendais, puisque c’est celui dans lequel concoure mon ami Francis Ash. Il n’empêche, je me suis prêté en toute objectivité à la lecture et aux commentaires des quatre récits proposés cette semaine. Bien-sûr, ces commentaires contenant des spoilers, je vous conseille de lire les nouvelles AVANT ces commentaires.


La danse de Saint-Guy, de Julien Noël :
Ce concours a le mérite de permettre à tous les styles et toutes les approches littéraires de s’exprimer. Néanmoins, rarement (pour ne pas dire jamais), je n’ai rencontré de style aussi impersonnel et anonyme. J’ai plus l’impression d’avoir lu la description d’une scène tirée hors de son contexte que d’avoir lu un récit qui racontait quelque chose avec un début, un milieu et une fin. On nous parle d’un conflit qu’il nous est impossible à situer dans le temps et l’espace avec des protagonistes dont on ne sera rien. Au milieu de tout ça une armurerie, des pendus et un géant. L’armurerie et les pendus trouvent leur justification dans le texte, mais le personnage du géant reste une énigme totale. Tout comme la raison de sa danse. L’absence quasi-totale d’action et la narration purement descriptive rend le texte lourd et donne une impression d’exercice scolaire du type « décrivez une scène ». Résultat, j’ai glissé à la surface des mots jusqu’à la fin sans jamais accrocher. Désolé, ce n’est pas pour moi.


Rafaele, de  Claire Girard:
Voici un beau récit original et assez touchant. Cette petite fille maltraitée qui échange avec ses peluches émeut. Quand on est parent (ce qui est mon cas), il est difficile de ne pas être touché par cette thématique. L’écriture est attachante. Toutefois, je regrette un gros manque de relecture qui nuit à la fluidité de l’ensemble (trop de coquilles). Sur le plan purement « fantastique » (puisque c’est le genre auquel a priori se rattache cette nouvelle), j’aurais tout de même quelques remarques cependant :
- Les peluches connaissent l’avenir (et même les réalités alternatives), super idée, mais par quelle magie ? Ce n’est pas très clair.
- Nounours se trompe de perspective (ah les paradoxes temporels !). Je m’explique : Nounours prétend que Rafaèle aurait dû non pas mettre du désordre dans sa chambre mais dans celle de sa mère (où elle aurait du y faire une découverte capitale pour son avenir). En fait, ce discours n’est tout simplement pas possible. Pour avoir la connaissance de cet avenir-là, Nounours devrait forcément en venir. Il lui faudrait donc avoir remonté le temps depuis ce futur « heureux ». De cette manière, il pouvait vivre en direct l’acte qui a transformé le futur « heureux » en « malheureux », créant ainsi une réalité alternative décrite dans cette nouvelle (re-regardez Retour vers le futur - ça tombe bien c’est son 30ème anniversaire !). Comme rien n’indique cela dans le récit (puisqu’on ne sait rien sur les capacités cognitives des peluches et que l’on ne nous parle pas de voyage dans le temps), il faut considérer que le texte décris la réalité non modifiée, selon laquelle la petite fille n’a pas mis le désordre dans la chambre de sa mère, mais bien dans la sienne. Le vrai futur est donc logiquement le futur « malheureux », Nounours et ses copains en peluches interviennent pour changer la course du temps et créer une nouvelle réalité alternative, le futur « heureux ». Du coup, dans le récit, il n’aurait pas dû dire « en faisant ceci cela, tu serais devenue ceci, tu aurais fais cela », mais plutôt, « grâce à cet acte, tu feras ceci cela et tu deviendras ceci cela », c’est pas tout à fait la même chose. Suis-je compréhensible ?
Cela dit, ce récit m’a beaucoup plu et m’a poussé à la réflexion. Avec une bonne relecture, il sera excellent.


Précieux, d’Annabelle Blangier  :
Un bateau qui erre en mer au milieu d’un brouillard épais, un équipage aux abois, un garçon curieux, des bruits étranges de créatures aquatiques (des sirènes ?), en ça rien de très original. Toutefois l’auteur sait doucement  faire monter la tension tout au long de son récit. J’avoue avoir été pris par le récit. Le personnage du capitaine est bien décris. J’ai apprécié la justification du titre de la nouvelle qui donne matière à réflexion. De plus, les noms des personnages sentent bon la Bretagne, ce qui donne un certain charme à l’ensemble. Le style participe très bien à entretenir le mystère. La conclusion tragique était un peu attendue, mais est logique. En conclusion, un bon récit.


Mort Chronique, de Francis Ash :
A priori, il n’est pas évident de commenter la nouvelle d’un ami et comparse d’écriture. Voilà bien une vingtaine d’années que je côtoie l’écriture de monsieur Ash sous ses différents noms de plume. J’ai donc déjà eu de nombreuses occasions de commenter ses récits et pas que pour en dire des louanges, il pourra l’attester. Cette précision faite, commençons.
Dès les premières phrases, j’ai été accroché par les mots et la thématique. Il flotte un parfum de code quantum dans cette nouvelle, sauf que l’esprit qui bondit de corps en corps, tue systématiquement son porteur. Si la mort de Serge m’a laissé froid (peut-être parce que le personnage paraît, reconnaissons-le, un peu ridicule), celle d’Eléonore était touchante, mais ce n’est rien comparé à celle de la petite Merline (quel drôle de prénom d’ailleurs !) qui m’a quand même bien remué, mais bon c’est l’effet recherché, je suppose.
J’ai aussi été saisi par un sentiment d’urgence. Comme le personnage principal, on court, on  court, en se demandant quelle en sera la destination et le pourquoi de cette course. Le style participe beaucoup à cela en insufflant un rythme haletant, sans pourtant laisser de côté descriptions et moults détails. On comprend très vite que l’esprit n’a que peu très peu de temps pour atteindre son but.
L’esprit de qui d’abord ? La révélation de son identité n’a en fait pas beaucoup d’importance, c’est ce qui lui est arrivé qui compte. Pourquoi suite à son meurtre saute-t-il de corps en corps ? là ça restera un mystère. J’imagine que trouver une explication aurait été laborieux voire tiré par les cheveux, du coup, un petit sentiment de frustration à ce niveau là.
Et puis quel but au fait ? Là aussi petite frustration. Finalement, il n’aspire qu’à mourir. On aurait pu imaginer qu’il veuille plutôt se réincarner définitivement dans un corps sans que celui-ci ne meure aussitôt. Bon du coup, on partait dans autre chose et ce n’était plus vraiment « mort chronique », je le concède.
Concernant le twist final, franchement, je l’ai trouvé excellent. Il m’a fait penser aux vieux films d’horreur où l’on pense que tout est fini alors qu’il n’en est rien. Je n’en dirais pas plus, mais l’effet est réussi.
Certes, il y a quelques détails qui ont pu m’interpeller, mais globalement, par ses qualités narratives, ce récit est d’excellente tenue. Francis Ash peut être assuré de tout mon soutien. Allez, osons le dire, on a peut-être là un candidat pour le carré final. En tout cas, au moment où j’écris se profile doucement mais sûrement une qualification pour la suite. C’est mérité.


Voilà ce que je pouvais dire sur ces 4 textes. Le groupe D m’a davantage emporté que le groupe C dont le grand gagnant « des vacances à la ferme » m’a laissé dans l’incompréhension la plus totale.

A nouveau, je vous invite à vous faire votre propre avis en LISANT les nouvelles sélectionnées disponibles au lien suivant :


Et surtout ensuite d’aller VOTER pour vos nouvelles préférées.


Précision importante : La semaine prochaine fera exception à la règle. Etant donné que c’est ma nouvelle qui entre en lice (dans un groupe où dit-on il n’y a pas de nouvelles faibles, aie !), je ne publierai pas de commentaires avant la proclamation des résultats pour assurer une parfaite neutralité. Par contre, je ferai un petit point d’étape sur le tournoi en y allant de mes impressions et pronostiques. 

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